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QuébecEntrevueRécit de voyage

Monia Chokri: Nomade à temps partiel

Rencontre avec la réalisatrice québécoise pour parler de voyages.

Cannes, Venise, Paris, Tunis : la réalisatrice québécoise Monia Chokri, qui a remporté le prix Coup de cœur du jury dans la catégorie « Un certain regard » au Festival de Cannes 2019, vit plusieurs mois par année dans ses valises. Par plaisir, certes, mais surtout pour le travail. Rencontre avec une nomade qui flirte avec l’idée de se poser.

Monia Chokri voyage depuis sa tendre enfance. Jeune, elle passait un été sur deux en Tunisie, son père étant originaire de ce pays d’Afrique du Nord. À 18 ans, cependant, elle décide qu’elle a vu ce qu’il y avait à voir et veut découvrir autre chose. Elle n’y remettra les pieds que 18 ans plus tard, en 2019, sur un coup de tête, pour un court séjour qui l’aura cependant marquée à jamais.

Vous n’avez pas toujours été aussi à l’aise de parler de vos origines tunisiennes que vous ne l’êtes maintenant. Qu’est-ce qui a changé ?

J’ai camouflé mes origines pendant longtemps parce qu’au départ, ça a handicapé mon travail. Je ne voulais pas que ça teinte la vision que les gens avaient de moi. La femme de mon frère, ç’a été pour moi une acceptation de mon identité. De mettre en scène un père méditerranéen, ça m’a permis de réaliser que d’être différente, c’était une force, et non pas une contrainte. Cette année, j’ai fait beaucoup de cheminement là-dessus. J’ai décidé d’aller voir mon père qui habite en Tunisie l’hiver et j’ai compris une chose très importante sur mon identité : ma famille est berbère, et non pas arabe. C’est un peu comme être Autochtone au Québec. Les berbères, c’est un peuple libre, c’est un peuple de nomades. D’avoir compris ça, ça me libère l’esprit et ça change tout mon rapport à l’art.

Qu’avez-vous pensé de la Tunisie que vous avez retrouvée ?

J’ai été surprise parce que je m’attendais vraiment à voir une Tunisie changée grâce à la révolution mais, finalement, j’y ai retrouvé la Tunisie de mon enfance. Je me promenais dans les rues et les odeurs étaient les mêmes, les gens avaient la même culture, le même état d’esprit. En deux secondes, j’avais tous mes repères.

Qu’aimez-vous surtout du voyage ?

Ce qui est beau dans le principe de voyager, c’est qu’on vit dans le moment présent, et c’est quelque chose qu’on ne ressent pas souvent. Le voyage, ça rend heureux parce qu’on est dans le moment, toujours en train d’explorer, de voir quelque chose de nouveau.

Est-ce que le fait de voyager autant teinte votre travail d’actrice et de réalisatrice ?

Mon métier est un métier d’observation constante. C’est sûr que le fait de passer beaucoup de temps à Paris, par exemple, ça influence mon travail d’actrice. [Les Français] ont une manière de jouer qui n’est pas la même qu’au Québec. J’ai apporté un peu d’ici là-bas, et un peu de là-bas ici.

Vous avez travaillé beaucoup en France et en Belgique, ainsi qu’au Québec. Pensez-vous vous installer à l'étranger un jour ?

Un moment donné, je voulais partir vivre en France. Ça fait 10 ans que je tergiverse. En ce moment, j’y passe environ quatre mois par année, répartis sur de petits séjours. J’aimerais y passer plus de temps : pas la moitié de l’année, mais pas loin. Si j’écrivais un film en France, il faudrait que je m’installe là-bas plusieurs mois. Parce que tout se passe dans les détails, on doit comprendre la culture pour bien la rendre à l’écran. C’est beaucoup de travail.

Lors d’un séjour à l’hôtel, qu’est-ce qui fait que vous vous souviendrez de l’endroit ?

Il y a quatre choses hyper importantes pour moi dans un hôtel : le lit, le peignoir, les produits et le rapport que j’ai avec les gens du lobby. J’aime l’hôtellerie de proximité, à l’échelle humaine.

Vous êtes née dans la ville de Québec. Y retournez-vous souvent ?

Quelques fois. Mes parents et ma sœur y sont encore. Québec, pour moi, c’est la famille, c’est l’enfance et l’adolescence. Chaque coin de rue est marqué d’une histoire. C’est là que j’ai vécu toutes les émotions liées à la construction de ma personnalité et de ma psyché affective. Parfois, c’est pesant, parfois, c’est exaltant.

Quels sont vos coups de cœur à Québec ?

La nouvelle partie du Musée national des beaux-arts du Québec est exceptionnellement belle. Côté restaurant, j’ai découvert l’automne dernier Le Renard et la Chouette. Quand j’y suis allée, j’ai vraiment été jalouse. Je me suis dit que c’est le genre de resto que j’aimerais avoir à Montréal.

Si vous pouviez tourner un film n’importe où dans le monde, où est-ce que ce serait ?

Si je n’avais vraiment pas de contraintes, que je parlais la langue et que j’avais un scénario fort, j’irais à Rome. Rome, la nuit, c’est la plus belle chose que j’ai vue de ma vie. C’est la matérialisation de la grande beauté et de l’élégance. C’est extrêmement romantique.

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Virginie Landry5 novembre 2019
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